Aux USA, les gens communiquent de plus en plus entre eux. Mais ils se parlent de moins en moins. Désormais, on écrit pour ne rien dire…
Les récentes statistiques américaines sont bouleversantes:
– 80% des Américains qui possèdent un téléphone mobile envoient des messages-texte ou SMS (Short Message Service);
– les SMS sont lus 5 secondes après leur réception et répondus 2 secondes plus tard;
– 54% des consommateurs ayant grandi avec un téléphone mobile préfèrent envoyer un SMS plutôt que parler.
Dans bien des cas, le clavier informatique ou téléphonique a remplacé la bouche. Pourtant, la communication verbale (160 mots/minute) est beaucoup plus enrichissante et plus rapide que la communication écrite (40 mots/minute).
Bouches closes
Un jour, je reçois un courriel d’une personne désirant créer une société aux USA par l’intermédiaire de CorpoMax. Je lui envoie immédiatement notre courriel usuel de présentation, truffé d’informations utiles. Dans celui-ci, je l’invite à me contacter par téléphone (ou Skype vocal) ou encore à m’indiquer le numéro de téléphone où je peux la joindre.
L’intéressée m’écrit de nouveau, ne souffle mot sur mon invitation à communiquer, et me soumet 22 questions numérotées. De nouveau, je lui écris et lui indique qu’il me fera grand plaisir de lui répondre au téléphone. Sa réponse, toujours écrite, suit immédiatement: « Pour l’instant, je préfère que nos communications se fassent par écrit… »
Bouleversé, je suis.
Je lui réponds poliment que le temps étant une ressource limitée et non renouvelable, je ne peux malheureusement pas répondre à ses questions par écrit. En effet, certaines réponses demandent un développement important. Toutefois, je l’invite de nouveau à me contacter par téléphone, lui réitérant qu’il me fera plaisir de répondre à ses questions verbalement.
Jamais eu de nouvelles.
Ce potentiel client aurait eu accès à une mine de renseignements, tout à fait gratuitement, s’il avait accepté de parler (pour exposer son projet) et d’écouter (mes réponses adaptées à son projet).
Bouches à louer
Désormais, on offre des voix à ceux qui ne veulent pas utiliser la leur.
Par exemple, le site américain Fiverr.com offre des services de voix hors champ (voiceover) pour accompagner des vidéos corporatifs.
Pourtant, il est impossible de parler aux prestataires de ces services. Tout échange avec ceux-ci doit se faire exclusivement par écrit, via la messagerie interne de Fiverr.
Bouches indésirables
Il y au moins deux types d’appels téléphoniques qui font suer le peuple aux USA.
Tout d’abord, les appels préenregistrés.
Vu l’inexorable passage du temps et son effet dévastateur sur ma personne, je dois malheureusement rencontrer mon médecin de temps à autre. La veille d’un quelconque rendez-vous, je reçois trois rappels : un courriel, un SMS et un appel téléphonique préenregistré. Tous reçus en moins d’une minute. Bref, comment devenir cardiaque grâce à son médecin…
Ensuite, les appels automatisés.
Relativement faciles à détecter : une pause de 1-2 secondes suit ma réponse téléphonique. Puis, un humain demande à parler « au responsable des achats » ou « au département IT ». Parfois, on demande à parler à « Vincent Allard », nom faisant sûrement partie d’une liste achetée des banques, bureaux de crédit ou autres fournisseurs insignifiants. Avant leur laïus de vente, on me demande invariablement comment je me porte. Comme si cela leur importait.
Au début, étant bien élevé, je leur mentionnais mon manque d’intérêt pour leur proposition commerciale. Après 15 ans aux USA, je ne perds plus de temps avec ces appels nullement sollicités : je raccroche sans dire un mot.
Bouches inatteignables
Avez-vous déjà tenté de contacter le service à la clientèle de Google, Gmail ou YouTube par téléphone? Impossible. Je vous mets au défi de trouver leur numéro de téléphone. Aucun moyen de parler à un humain.
La seule exception : vous êtes un client « payant » (ex : les annonces Google Adwords, telle que l’annonce vidéo de CorpoMax). Dans un tel cas, vous pouvez parler à un employé en moins de 5 secondes.
Plusieurs grandes sociétés américaines ont mis au point un système téléphonique fort éprouvant pour leurs clients avides de renseignements. A l’aide du clavier téléphonique ou de la reconnaissance vocale, on doit répondre à une série de questions pendant 10 minutes avant de pouvoir parler à un humain.
Lorsque CorpoMax doit obtenir du IRS (Internal Revenue Service) un numéro fiscal américain (EIN) pour les sociétés créées par son entremise, il faut parfois attendre une heure au téléphone avant de pouvoir parler au préposé gouvernemental.
Bouches incompréhensibles
Plusieurs grands groupes américains ont délocalisé leur service à la clientèle, présumément afin de réduire leurs coûts de main-d’oeuvre. La personne qui vous répond est désormais basée en Inde, au Pakistan, aux Philippines, ou partout ailleurs qu’aux USA. Encore récemment, la société Dell offrait deux niveaux de service téléphonique : régulier (quelqu’un va vous parler, gratuitement) ou premium (quelqu’un basé aux USA va vous parler, moyennant paiement).
Le problème avec certains préposés basés à l’étranger, c’est que leur accent anglais est absolument incompréhensible. Cela crée donc des conflits et une perception négative envers l’entreprise concernée.
Conclusion
Très bientôt, votre bouche va devenir complètement désuète. Il est donc inutile de me contacter par téléphone pour en discuter. Un simple courriel, SMS ou commentaire au bas de ce blog sera suffisant…
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